La nature est une armée de bénévoles (hautement qualifiés).
Un arbre mature inspire 150 kilogrammes de dioxyde de carbone par année, filtre les gaz polluants, piège les particules fines dans ses feuilles et expire de l’air pur. Chaque année, ses racines emmagasinent plus de 15 000 litres d’eau, ce qui régule les débits d’eau et réduit les risques d’inondation. Sa canopée refroidit l’air de deux à huit degrés, réduisant ainsi notre consommation d’énergie liée à la climatisation de 30 %.
Les milieux humides maintiennent l’équilibre de leur environnement. Pendant les tempêtes de pluie, ils préviennent les inondations en emmagasinant l’eau. Pendant les sécheresses, ils libèrent lentement la quantité d’eau nécessaire. En plus de stabiliser le sol et d’empêcher l’érosion, les milieux humides purifient naturellement l’eau en décomposant les contaminants. L’aquifère reçoit donc de l’eau potable propre.
Bref, les actifs naturels assurent, entre autres, l’approvisionnement en eau potable, la gestion des eaux pluviales, l’atténuation des inondations, ainsi que la purification de l’air et son refroidissement. Et ce, gratuitement.
Pourtant, malgré tout ce qu’ils offrent gratuitement, les actifs naturels continuent de figurer dans la colonne des coûts dans les bilans municipaux.
Comment reconnaître la véritable contribution de la nature?
Même si nous dépendons des actifs civiques naturels – comme les arbres, la végétation et les aquifères – pour la préservation de la vie, nos stratégies municipales de comptabilité et de gestion des infrastructures présentent habituellement une vue très unidimensionnelle de ces actifs. Bon nombre de nos structures bâties, comme les routes, les égouts et les ponts, sont traitées comme des actifs, mais fonctionnent davantage comme des passifs.
La Ville de Gibsons, en Colombie-Britannique, offre un exemple de valorisation d'actifs naturels comme actifs municipaux parce qu'elle les comptabilisent comme tel. Cette municipalité a établi que son aquifère représentait 75 % de son eau potable. Pour respecter et préserver ce service essentiel, elle a adopté une approche d’écofiscalité et une politique municipale de gestion des actifs qui reconnaissent explicitement les actifs naturels et rend obligatoire leur entretien, au même titre que les autres immobilisations.
En plaçant les actifs naturels au cœur du processus décisionnel municipal, la Ville de Gibsons a cristallisé les risques éventuels liés à la dégradation de son aquifère. Elle a ainsi établi les arguments économiques nécessaires à la préservation des services écologiques. Cette décision a contribué à sensibiliser le public et mené à un référendum positif au cours duquel les citoyens ont voté pour augmenter leur impôt foncier afin de financer la préservation de l’aquifère de la municipalité.